Le groupe Doux devrait sortir cette semaine du redressement judiciaire à la faveur d'une décision en ce sens du tribunal de commerce de Quimper, une victoire pour le volailler qui devra cependant au cours des prochains mois faire la preuve de sa capacité à surmonter la crise de la filière.
Lors d'une audience mardi à 14h00, Doux présentera le plan qu'il a élaboré en vue de continuer son activité. Il fera notamment état devant les juges de la future composition de son capital avec l'arrivée annoncée du holding de l'homme d'affaires Didier Calmels (D&P) et du groupe saoudien Almunajem, son premier client.
Le premier sera majoritaire avec 52,5 % des parts, alors que le second devrait détenir 25 % du capital du groupe. La famille Doux passera de 80 % actuellement à 22,5 %, tandis que BNP Paribas, qui détient aujourd'hui 20 % des parts, se retirera.
Un pacte d'actionnaires aura été signé avant l'audience afin de fixer les engagements de chacun des partenaires et « le planning effectif d'entrée au capital des uns et des autres », selon le groupe. Le processus devrait aboutir en février.
Doux va également faire la démonstration mardi qu'il est « capable de financer son besoin en fonds de roulement, ses investissements industriels et le remboursement de son passif », explique Régis Valliot, administrateur judiciaire du groupe.
Le volailler, qui prévoit d'investir quelque 80 millions d'euros en huit ans pour moderniser son outil de production, devrait passer d'un passif de 340 millions d'euros lorsqu'il a été placé en redressement judiciaire en juin 2012, à un passif compris entre 60 et 70 millions d'euros payables sur dix ans.
« Toutes les conditions semblent réunies pour que l'on puisse se présenter sereinement devant le tribunal mardi », se félicite Me Valliot. Les juges devraient mettre en délibéré leur décision qui pourrait être rendue vendredi.
2014, année de tous les dangers
2014 restera cependant l'année de tous les dangers pour le volailler, alors que l'industrie agroalimentaire traverse une crise sans précédent en Bretagne, suscitant la colère de milliers de travailleurs victimes de restructurations. « 2014 est l'année difficile », reconnaît Me Valliot.
Le plan permettant au groupe de retrouver la rentabilité, et élaboré en réponse à la perte des aides européennes à l'exportation, ne devrait ainsi pas produire d'effets avant deux ou trois ans.
En 2013, le groupe a touché 17 millions d'euros d'aides européennes, alors qu'il aurait dû en recevoir 55 millions. En 2014, il n'en recevra plus du tout. Bruxelles a en effet supprimé en juillet ces « restitutions » qui permettaient aux poulets européens d'entrée de gamme de concurrencer les volailles brésiliennes sur le marché international et notamment au Moyen-Orient.
Cependant, le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll a annoncé vendredi que la France allait dégager 15 millions d'euros d'aides européennes afin d'aider la filière du poulet d'exportation à gérer la fin de ces subventions. Une bouffée d'air pour Doux, bien qu'il ait affirmé au cours des derniers mois être en mesure de se passer de ces aides.
A l'arrêt des restitutions, s'ajoute l'effondrement du réal, qui rend le poulet brésilien encore plus compétitif.
Des difficultés qui pourraient conduire à un rapprochement entre Doux et son concurrent Tilly-Sabco (340 salariés), fortement touché par la fin des restitutions. Une option évoquée par le gouvernement : « L'hypothèse d'une fusion est possible, ça fait partie des options ouvertes », a déclaré vendredi M. Le Foll, se disant « ni favorable, ni contre » cette éventualité.
« Le débat est ouvert », a-t-il simplement ajouté, estimant cependant que « le premier élément de stabilisation [de la filière avicole bretonne, ndlr] c'est le plan de continuation de Doux. »
Le volailler s'est recentré sur l'exportation et la transformation [Père Dodu] après s'être allégé de son pôle frais, liquidé au prix de la suppression d'un millier d'emplois. Désormais, il compte 2.100 salariés, dont environ 1.700 en CDI.