vendredi 12 mars 2010 - 11h27
Blessés par des balles rondes, Jean-Marie et Liliane Lallement ont des séquelles. Leur retour à l'emploi passe par la reconnaissance du handicap.
L'émotion est encore vive. Jean-Marie et Liliane Lallement, éleveurs à Novion-Porcien (Ardennes), ont du mal à retenir leurs larmes lorsqu'ils évoquent leur accident du travail.
Il est 20 heures, ce soir de septembre 2007. Les époux terminent les soins au troupeau. En fermant la porte du hangar, des balles de foin s'effondrent sur eux. Etendu au sol, sous un chariot, Jean-Marie a perdu connaissance. Liliane, tombée à genoux, trouve la force de se relever.
Malgré l'intense douleur au niveau du dos, elle regagne la maison pour appeler le Samu et prévenir ses fils, âgés de 16 ans. Maxime place rapidement son père en position latérale de sécurité. Un geste salvateur.
Jean-Marie sera hospitalisé un mois, puis transféré dans un centre de rééducation fonctionnelle. Il est victime d'un sévère traumatisme crânien. Liliane souffre d'une fracture du rachis dorsal et de tassements vertébraux.
Immédiatement, une chaîne d'entraide se met en place. Un délégué MSA du canton se charge de trouver un salarié pour la traite et afin de s'occuper des poules pondeuses. Les voisins et amis se relaient pour les semis, labours, fauchage, etc. « Nous n'oublierons jamais le grand élan de solidarité de notre entourage. »
Se faire aider
Deux ans et demi après l'accident, Jean-Marie est toujours en arrêt de travail. Il doit reprendre cette année. « Je n'arrive pas à rester concentré plus d'une heure ou deux », constate-t-il. « Il ne peut plus cumuler trop de stress », ajoute son épouse.
« Notre médecin traitant et le neurochirurgien se battent pour nous. Je souffre d'un handicap invisible. Ma mémoire me joue des tours », avoue Jean-Marie, qui a également perdu l'audition d'une oreille.
Liliane, elle, a repris en novembre 2009. Elle recommencera la traite quotidienne après l'aménagement de son poste de travail (voir encadré).
« Un accident, c'est lourd. Il y a eu une vie avant. Il y a la vie après. La personnalité change. Nous sommes beaucoup plus sensibles. Parfois, en tant qu'exploitants, nous avons l'impression de payer beaucoup d'assurance. Mais si nous n'avions pas été bien couverts, nous ne serions plus agriculteurs. C'est grâce aux indemnités journalières de l'assurance obligatoire et notre complémentaire santé Groupama que nous avons pu payer les quatre salariés qui se sont succédé », met en garde Liliane.
Elle poursuit : « Il faut accepter de se faire aider, sinon c'est la cellule familiale qui éclate. Au bout de deux ans, je me sens plus forte. Le suivi pluridisciplinaire du Service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah) m'aide. »
Les époux rencontrent ainsi régulièrement un psychiatre, un neuropsychologue, un ergothérapeute et une éducatrice spécialisée. Ces deux derniers se déplacent sur l'exploitation pour planifier le travail de chacun.
Jean-Marie, qui aime le contact, envisage une activité de vente directe. Il estime à 80 % son incapacité à accomplir les tâches qu'il effectuait avant ce coup dur. « Nous sommes désormais obligés de prendre un salarié pour continuer notre métier, et ce jusqu'à notre retraite, dans cinq ans environ. »
Aménagement d'activité Travailleur handicapé « Nous sommes très reconnaissants vis-à-vis de la MSA Marne-Ardennes-Meuse, et plus particulièrement d'Annie Queval, assistante sociale. » Celle-ci a organisé le remplacement à la ferme et l'intervention d'une aide ménagère. Elle a ensuite aidé Liliane à obtenir la reconnaissance « travailleur handicapé » en vue de l'aménagement de la salle de traite. Pour Jean-Marie, le taux d'incapacité sera connu au moment de la reprise du travail. Poste de travail La salle de traite va être modifiée, de manière à ce que Liliane puisse reprendre la traite. Parmi les investissements prévus : mise à hauteur du plancher, décrocheurs automatiques, portes pneumatiques, distributeur automatique de lait aux veaux, etc. Environ deux tiers des dépenses devraient être couvertes par l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph). |
par Catherine Yverneau
(publié le 12 mars 2010)
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