« Sur colza, j’ai pu économiser entre 50 et 60 unités d’azote en ajustant les doses dans mes parcelles », se réjouit Mathieu Cocagne, céréalier à Fesques, en Seine-Maritime.
Les associés du Gaec de l’Eaulne ont découvert Farmstar il y a cinq ans grâce à la coopérative Cap Seine et ont commencé par tester l’outil sur quelques parcelles de colza.
Satisfaits, ils ont ensuite petit à petit étendu son utilisation au blé puis à l’orge, pour finir par couvrir toutes leurs parcelles cette année, soit près de 280 hectares. « Cela nous a permis de faire des économies sur le poste de l'engrais tout en respectant mieux l’environnement, car les apports sont ajustés selon les besoins de la plante », affirme Mathieu.
Des conseils spécifiques par culture
Farmstar, développé par Arvalis et Infoterra (filiale d’EADS), évalue l’état de la culture à partir d’images satellitaires en calculant sa biomasse et sa teneur en chlorophylle. Ces informations sont ensuite intégrées à des modèles agronomiques, alimentés par des données météorologiques, afin de déterminer les dates des prochains stades et de fournir des estimations de biomasse, de risque de verse et bien sûr de besoins en azote.
Farmstar en chiffres • 2002 : début de commercialisation de l’outil • 3 cultures : blé, colza, orge d’hiver • 420.000 ha surveillés • 9.000 agriculteurs abonnés • 10 €/ha de coût moyen |
Pour le colza, l’agriculteur obtient les bilans de biomasse à l’entrée et à la sortie de l’hiver, ainsi que la préconisation de fertilisation.
Pour le blé et l’orge d’hiver, il reçoit le bilan de croissance à la sortie de l'hiver, la dose totale d’azote conseillée pour la campagne et l’estimation du risque de verse. Le blé fait l’objet de conseils supplémentaires : la préconisation de l’apport de la fin de la montaison, la réactualisation du potentiel de rendement selon le développement de la culture et l’évaluation des risques piétin verse et fusariose.
« Je me sers peu des informations sur les risques maladies, car je suis habitué à les surveiller moi-même, commente Mathieu. Les préconisations azote et le risque de verse sont pour moi les deux éléments les plus utiles. » Les cartes de préconisation de fertilisation permettent de repérer facilement les zones qui ont plus ou moins besoin d’azote.
« Mes sols sont très hétérogènes sur une partie de l’exploitation et je me retrouve parfois avec de fortes variations de doses au sein d‘une même parcelle, indique l’exploitant. »
En blé, il observe des variations de 40 à 50 unités et, en colza, cela peut monter à 70 unités d’écart selon les zones. Tenir compte de ces différences intraparcellaires est la clé des économies d’azote réalisées par l’agriculteur. Les cartes Farmstar lui permettent d’identifier les zones à plus fort potentiel, qui valoriseront bien l’azote, et celles à plus faible potentiel, sur lesquelles il n’est pas nécessaire d’apporter autant d’engrais.
Modulation facile
Quand les cartes sont disponibles, Mathieu les imprime pour pouvoir les consulter dans le tracteur. Il redécoupe ses parcelles en grandes zones, selon les doses conseillées et la largeur de son matériel, pour plus de facilité.
« Je vais jusqu’à trois doses différentes par parcelle, j’estime que c’est suffisant pour obtenir un résultat satisfaisant sans trop compliquer le travail, précise-t-il. Mais je ne module pas mes apports à chaque fois, seulement sur les plus importants. En colza et en orge, je le fais au deuxième apport et en blé, c’est sur le troisième. »
Les cartes de conseil Farmstar sont compatibles avec le matériel d’agriculture de précision. Mais Mathieu Cocagne n’est pas équipé du distributeur d’engrais solide adéquat, même s’il possède depuis peu un GPS. « Quand je module mes apports, j’utilise de l’azote liquide pour pouvoir le faire manuellement au pulvérisateur », déclare-t-il.
En se repérant sur la carte, il règle le débit du pulvérisateur en cours de route dès qu’il arrive dans une zone où la dose préconisée est différente. « Si la différence de dose est très grande, je dois également rouler plus ou moins vite pour adapter le débit. Dans l’ensemble, il est assez facile de moduler ses apports, même s’il est parfois impossible d’être précis avec une rampe de 40 mètres, sourit-il. »
Economie d’engrais et hausses de rendement
En outre, l’utilisation de Farmstar permet à Mathieu de faire des économies sur le poste de l'engrais et sur les régulateurs de croissance, grâce à l’évaluation du risque de verse. L’agriculteur estime gagner environ 30 €/ha sur colza. Sur blé et orge, il ne réalise en général pas d’économies d’engrais, mais ses rendements ont augmenté. Ces deux dernières années, il a récolté 105 et 110 q/ha de blé et 96 et 89 q/ha d’orge.
« Avant, en appliquant la même dose partout, j’en mettais trop à certains endroits et pas assez à d’autres, constate Mathieu. La meilleure répartition spatiale de la fertilisation m’a permis de mieux valoriser l’azote et d’améliorer mes rendements. »
Cette gestion des apports au sein de la parcelle est aussi un moyen de protéger la ressource en eau, car elle évite les excès d’engrais sur les plantes qui ne l’auraient pas assimilé et limite ainsi le risque de lessivage.
Mais Mathieu Cocagne ne se contente pas des observations des satellites, il les vérifie avant d’agir. « Parfois, les conseils m’étonnent, alors je vais voir sur le terrain ce qu’il en est, pour juger par moi-même de leur pertinence », signale l’exploitant.
Les cartes, elles permettent, par ailleurs, de repérer des anomalies et d’agir en conséquence. « Une année, sur une parcelle de colza, la carte indiquait une zone avec une très forte biomasse, se souvient Mathieu. J’ai trouvé cela étrange et, en allant voir sur la parcelle, j’ai réalisé que c’était en fait une zone très sale, avec des géraniums. »
Dans l’ensemble, Mathieu est satisfait de l’outil, qui lui permet également de justifier ses pratiques et de montrer qu’il respecte la réglementation. « Rien qu’avec les économies d’engrais réalisées sur colza, je paye l’abonnement à Farmstar, assure-t-il. Alors pourquoi s’en priver ? »
Le GPS commande les tronçons Gérer les coupures de tronçons du pulvérisateur automatiquement, c’est possible. C’est même la dernière tendance technologique sur le marché de la pulvérisation. Cette technique nécessite cependant de nombreux investissement en plus de l’option de coupure des tronçons sur l’appareil. Il faut, en effet, prévoir un dispositif de guidage suffisamment précis et fiable et réaliser une bonne cartographie de la parcelle (même si le simple détourage peut suffire dans certains cas). Une fois l’équipement mis en place, le chauffeur ne se préoccupe plus de la gestion des tronçons, qui s’ouvrent et se ferment en fonction de la position de l’appareil et de sa rampe dans la parcelle. Certains constructeurs allemands, comme Damman, proposent aujourd’hui d’augmenter encore la précision avec une gestion buse par buse. |
Economies d’azote avec la modulation par zone Depuis 2009, Farmstar propose des zonages simplifiés pour rendre la modulation des doses plus accessible aux agriculteurs qui ne sont pas équipés d’épandeurs ou de pulvérisateurs automatisés et qui souhaitent le faire manuellement. Pour cette parcelle de colza de 14 ha, l’outil conseille à Mathieu Cocagne de délimiter deux zones : sur 84 %, il devra apporter 167 unités d’azote et sur les 16 % restants seulement 107 U. Pour une application uniforme, la dose totale préconisée sur la parcelle est de 2.355 U. En suivant le conseil de modulation, Mathieu n’appliquera plus que 2.219 U, ce qui représente un gain de 136 U. |
par Sébastien Chopin, Bérangère Lafeuille, Corinne Le Gall, Nicolas Levillain, Florence Mélix, Vincent Thècle et Cécile Vinson (publié le 7 mai 2010)
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