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Patricia Bouffard partage son temps entre son élevage et deux tournées de livraisons des produits laitiers pour le compte de la SARL.

Article 21 :

Stratégie - La SARL écoule le camembert bio

Dans la Manche, Patricia Bouffard et onze producteurs se sont regroupés pour commercialiser eux-mêmes les produits laitiers bio qu'ils font fabriquer à façon par la coopérative d'Isigny-sur-Mer.

Au quotidien, Patricia Bouffard est aux manettes de son élevage laitier biologique, à Hiesville, dans la Manche. Deux fois par semaine, elle change de casquette: le mercredi et le jeudi, elle prend le volant d'un camion frigorifique pour livrer du camembert, du beurre et du lait bio dans tout le Cotentin, pour le compte de la SARL «Les fermes du bio», dont elle est une des associés. Ces produits sont fabriqués à façon par la coopérative d'Isigny-sur-Mer depuis maintenant deux ans.

«Isigny s'est lancée dans la fabrication de produits laitiers bio en 1997, explique Patricia. Je me suis convertie à ce moment-là. Ça n'a pas exigé de grands bouleversements: je n'ai rien changé dans mes pratiques, mis à part m'approvisionner en minéraux homologués pour l'agriculture biologique et limiter au maximum les traitements allopathiques.» Il faut dire que son système est simplifié à l'extrême. Ses 75 hectares sont implantés intégralement en prairies permanentes. Ces surfaces aux sols très portants autorisent un accès permanent aux pâtures, été comme hiver. Les 48 normandes ne sont nourries qu'à l'herbe. «Je ne leur apporte aucun concentré. Elles n'ont que de la pâture, du foin et des minéraux. Elles produisent 3.500 litres, mais elles ont une bonne fertilité et ne souffrent pas de pathologies lourdes.»

Reprendre la vente en main

Les premières années, Patricia ne s'occupe que de son élevage. La laiterie collecte, transforme et écoule son lait. Puis vient la crise de 2003. Les produits bio subissent le contrecoup d'une hausse brutale de la production française alliée à une commercialisation mal organisée. Isigny réduit la voilure et arrête la fabrication du beurre et de la crème. Ne sont conservés que le camembert et le lait infantile. Les trois quarts des livraisons sont déclassées et la prime retombe à 22 €/1.000 litres contre 90 €/1.000 litres les bonnes années. Patricia et ses collègues réagissent. «Nous avons décidé de nous occuper nous-mêmes de la commercialisation de nos produits, en sous-traitant leur fabrication à la coopérative, se souvient-elle. Nous ne nous sommes pas focalisés sur la transformation, car nous n'en avions ni les capacités, ni les moyens. Nous préférions reprendre la vente en main.» Isigny accepte le «deal», estimant qu'elle dégagera des excédents de lait bio par ce biais. «Les éleveurs réussissent sur des créneaux où nous n'allons pas, car peu crédibles en tant qu'industriels, explique Claude Granjon, directeur général adjoint de la coopérative. C'est par exemple le cas des marchés ou des commerces spécialisés dans l'alimentation biologique.»

«LES FERMES BIO». En 2006, les associés de la SARL ont vendu 50.000 litres de lait, 16 000 plaquettes de beurre et 40.000 camemberts sous leur propre étiquette. Ils sont finalement douze à s'engager dans le projet. La SARL «Les fermes bio» voit le jour en décembre 2004. Il faut d'abord prospecter, dans le triangle de Cherbourg, Vire et Caen, pour trouver des clients. Un travail de fourmi. «Nous avons fait du porte-à-porte auprès de tous les types de commerces: grandes surfaces, magasins bio, Amap (associations pour le maintien d'une agriculture paysanne), petits commerces de centre de ville et restaurants. Notre démarche a été très bien accueillie: tous sont en attente d'un lien direct avec le producteur. Dès le début, nous avons eu une vingtaine de points de vente.» La commercialisation démarre à l'été de 2005 avec cinq produits: camembert, lait UHT, beurre, crème fraîche et fromage frais. Ces deux derniers seront abandonnés au bout d'un an. «Ils étaient très bons, mais c'était infernal à gérer du point de vue de la logistique, à cause de leur durée de conservation très courte», regrette Patricia.

Du temps pour les tournées

Grâce à la simplicité de son système d'élevage, Patricia peut se dégager un mercredi et un jeudi sur deux pour des livraisons dans la région. En revanche, l'emploi du temps se complique quand elle doit acheminer des commandes à Paris... Heureusement, des charges réduites au minimum et un lait bien valorisé lui permettent ensuite l'emploi d'un salarié à temps partiel, qui se charge de la traite quotidienne.

Puis le marché du bio reprend des couleurs, et les ventes augmentent. Les efforts de Patricia et de ses collègues portent leurs fruits. Leur petite entreprise prend de l'ampleur. «Nous avons réussi l'essentiel, à savoir implanter le bio dans le secteur, se réjouit-elle. Pendant deux ans, nous avons beaucoup travaillé sans rien gagner. Mais c'était très formateur. Nous avons appris à gérer une entreprise et à faire du commerce. Les tournées auprès des clients exigent beaucoup de relationnel.» Parfois, Patricia est un peu débordée, surtout en période de vêlages, groupés sur mars et avril, mais elle continue.

«La vente me fait sortir de mon exploitation et rencontrer des gens, explique-t-elle. C'est un enrichissement auquel je tiens. Et malgré le temps que ça me prend, je me suis prise au jeu! Avec notre petit statut d'éleveurs, nous arrivons à nous débrouiller. Le défi a été relevé.»

Patricia Bouffard et Benoît Lacroix, de la SARL Les fermes bio. Le commerce est fait par les paysans

La SARL «Les fermes bio» se crée autour d'une idée centrale, ce sont les producteurs eux-mêmes qui démarchent et livrent les produits fabriqués avec le lait bio. La coopérative collecte et achète leur lait, transforme les quantités comandées, et leur revend les marchandises, comme à ses autres clients. Les six premiers mois, la SARL fait transformer 30.000 litres. En 2006, elle passe à 250.000 litres, pour un chiffre d'affaires de 175.000 euros. «Nous souhaitons rendre le bio abordable, précise Benoît Lacroix, le gérant de la structure. Mais nous sommes aussi dépendants de notre prix d'achat à la laiterie. Aujourd'hui, nos marges bénéficiaires sont trop faibles.» Grâce à leurs trois produits «de base», les associés peuvent écouler de gros volumes. Pour augmenter leurs marges, ils ont pensé à des produits à plus forte valeur ajoutée, mais le marché croule déjà sous une offre de yaourts bio industriels. «Notre objectif est d'augmenter les volumes sans accroître le travail, explique Benoît. Nous voulons aussi conserver une assise régionale. Nous avons été de bons commerciaux, nous devons devenir de bons gestionnaires. A présent, nous commençons à pouvoir rémunérer ceux qui font tourner la SARL!»

par Elsa Casalegno

(publié le 1er juin 2007)

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