«J’ai effectué ma conversion à l’agriculture biologique en 1999, mais cela faisait cinq ou six ans que l’idée me trottait dans la tête. Je raisonnais déjà mes traitements, signale Bernard Comte, agriculteur à Pierrelatte (Drôme), sur près de 200 hectares. C’est une façon de voir l’agriculture qui me convient. Parmi les points clefs, le désherbage arrive en premier. Il est essentiel de contrôler au mieux l’enherbement pour s’assurer du meilleur rendement. Il faut toutefois garder à l’esprit qu’en bio les parcelles ne seront jamais entièrement propres.»
Entre cultures d’hiver et cultures de printemps, les méthodes de désherbage à mettre en oeuvre diffèrent. Toutefois, dans les deux cas, il est important de réaliser un maximum de faux semis pour épuiser les stocks d’adventices. «Bien souvent, je réalise un labour que je referme rapidement pour une meilleure germination des mauvaises herbes, puis j’effectue un ou deux passages de vibroculteur avant les semis. Au printemps, je passe en plus le Terramax à deux reprises pour une bonne préparation du lit de semences, ce qui permet d’augmenter la vitesse et l’efficacité du binage.»
Il est aussi essentiel de retarder tous les semis pour que les levées d’adventices ne soient pas favorisées. «L’année dernière, j’ai semé du blé une semaine trop tôt et ma parcelle a été infestée de ravenelles que je n’ai pas habituellement», souligne l’agriculteur.
Sous-solage contre les vivaces
Bernard Comte implante des engrais verts (trèfle de Perse, féverole, triticale) pour leur action fertilisante. Mais ils permettent aussi de maintenir propres les parcelles durant l’interculture.
«Par ailleurs, l’alternance de cultures de printemps et de cultures d’hiver est obligatoire sur une exploitation bio pour nettoyer les terres», insiste-t-il. Il a même introduit de la luzerne dans ses rotations car elle apporte de l’azote. Elle présente un effet nettoyant grâce aux coupes qui affaiblissent les vivaces (laiterons, chardons...). Bernard Comte explique toutefois que le plus efficace pour venir à bout de ces adventices reste le sous-solage. Il doit être mis en oeuvre juste avant le semis et à un stade assez avancé des adventices pour couper leurs rhizomes. Le risque est malgré tout d’assécher la terre. La technique est donc plutôt réservée aux parcelles irriguées ou au tournesol, moins sensible à la sécheresse.
Du côté du désherbage mécanique, sur blé, le premier passage de herse étrille est déterminant. «On arrivera difficilement à rattraper une parcelle sale au deuxième passage», ajoute-t-il. Il a donc lieu au stade des trois feuilles du blé et doit être réalisé en conditions sèches et à vitesse lente (4 km/h). Cette technique nécessite en revanche d’augmenter de 10% la densité de semis car certains pieds sont détruits. En février, la herse est à nouveau passée pour nettoyer le blé des quelques repousses qui persistent, et cela permet également d’incorporer l’engrais à base de farine de plume. Cette fois, la vitesse approche les 7-8 km/h. Sur colza, une culture plus couvrante, un seul passage de herse étrille au tout début du cycle suffit.
Maïs plus sensible
Le pois d’hiver craint, quant à lui, énormément la concurrence des mauvaises herbes. «Je l’implante après un tournesol car, chez moi, c’est la culture qui laisse les parcelles les plus propres. Je passe la herse étrille le plus tôt possible après la sortie du pois. Plus tard, la plante serait blessée», commente l’agriculteur. La féverole peut, pour sa part, être binée car Bernard Comte utilise un semoir pneumatique avec un écartement de 55 cm.
Au printemps, quelle que soit la culture implantée, la première intervention se fait toujours avec la bineuse avant équipée d’étoiles (ou à doigts), qui permet de désherber le rang à 3-4 km/h. Le travail sur le rang peut être plus resserré pour le tournesol et le soja que pour le maïs, qui demeure une culture sensible. Pour le tournesol, l’intervention a lieu au stade d'une à deux paires de feuilles. La bineuse arrière classique est ensuite passée plus rapidement pour désherber l’interrang. Sur maïs, où la préparation doit être la plus fine possible, le binage avant se fait précocement vers deux, trois feuilles. «Depuis peu, j’effectue huit à dix jours après un deuxième binage avant. J’ai remarqué que mon maïs est ainsi plus propre. Et comme j’irrigue cette culture, je passe ensuite la bineuse arrière au stade limite du passage de tracteur. L’intervention est rapide car je fais deux hectares à l’heure, signale l’exploitant. Sur soja, j’obtiens une très bonne efficacité en passant la herse étrille à 1,5-2 km/h, environ huit jours après le semis et en intervenant par la suite trois fois avec les bineuses: deux passages à dix jours d’intervalle avec la bineuse à doigts en début de végétation, puis avec l’outil classique vers le stade de 20-30 cm du soja. Auparavant, avec des produits phytosanitaires, je désherbais cinq hectares à l’heure contre un hectare à l’heure en moyenne actuellement. Toutefois, même si les façons culturales nécessitent davantage de main-d’oeuvre, le passage à l’agriculture biologique a représenté un défi, une manière de se prouver qu’il était possible d’y arriver sans produit, et ce, tout en ayant des résultats corrects» , résume Bernard Comte.
Une écimeuse pour faciliter la récolte «J’ai dû investir dès la première année dans une herse étrille et une bineuse avant de précision, équipée d’étoiles. L’année suivante, je me suis équipé d’une écimeuse de 15 m de largeur, ce qui n’est pas courant mais ça facilite la récolte. Quand les folles avoines dépassent les blés, j’interviens rapidement puis repasse huit jours plus tard. Sur soja, je coupe les chénopodes, les daturas et les amarantes pour les assécher en août. Cela empêche les adventices de tacher les graines. J’évite ainsi que ma récolte soit déclassée en alimentation animale, payée deux fois moins. Le cas échéant, juste avant que mes colzas ne montent, j’écime deux fois les moutardes des champs, à quelques jours d’intervalle. Ces adventices peuvent augmenter le taux d’acide érucique dans l’huile de colza. J’interviens même chez d’autres personnes sur des cultures diffi ciles à nettoyer, comme le pois chiche ou la lentille.» |
par Céline Fricotté (publié le 16 novembre 2007)
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